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Tout savoir (ou presque) sur le charbon

Dans le domaine de l'énergie, peu de ressources ont suscité autant de controverses que le charbon. Depuis des siècles, ce combustible fossile noir et riche en carbone a joué un rôle essentiel dans le progrès humain, l'essor des révolutions industrielles et façonnant ainsi le monde moderne. Mais avec la nécessaire transition vers un modèle énergétique plus durable, le charbon se retrouve au cœur d'un débat animé, entre son importance historique et son impact environnemental non négligeable.

Dans le cadre de l'escale d'Energy Observer en Afrique du Sud, pays qui produit 85% de son électricité à partir du charbon, Beatrice Cordiano, notre scientifique et experte en énergie, s'est penchée sur les questions suivantes : d'où provient cette énergie fossile ? Une production de charbon propre est-elle possible ?

Une histoire de plusieurs millions d'années

Même si les premières mines documentées remontent à la Chine antique et l'Empire romain, l'histoire moderne du charbon a commencé il y a 250 ans. Plus précisément au début de la révolution industrielle, lorsque des inventeurs britanniques ont découvert qu'il pouvait être utilisé pour chauffer l'eau, produire de la vapeur et faire tourner des turbines pour alimenter des machines. Il s'est avéré être un substitut rentable au bois, fournissant plus d'énergie lorsqu'il est brûlé. Depuis lors, le charbon est devenu une ressource indispensable, largement utilisée pour la production d'électricité, le chauffage domestique et pour produire le béton et l'acier largement utilisés dans nos sociétés.

Mais le charbon est bien plus ancien que cela. Ses origines remontent à des millions d'années, lorsque des plantes riches en carbone se sont décomposées dans des marécages et que, au fil du temps, l'action combinée de la pression et de la chaleur les a transformées en roches noires et brillantes chargées d'énergie.

L'exploitation du charbon dans la révolution industrielle britannique

Ces restes altérés de végétation préhistorique se présentent sous différentes formes, chacune avec leurs propres caractéristiques, composition et densité énergétique. De la tourbe à l'anthracite en passant par le lignite, le sous-bitumineux et le bitumineux : le charbon est classé en fonction de son évolution dans le temps et, par conséquent, de sa teneur en carbone. Plus la veine de charbon est profonde, plus il lui a fallu de temps pour se former, plus sa pureté et sa qualité sont élevées.

Cela s’explique par le fait qu’en profondeur, le matériau est soumis à des températures et des pressions plus élevées, et que la quantité de de débris végétaux transformés en structures carbonées est importante. Pour résumer : plus le charbon est ancien, meilleure est sa qualité.

Centrale électrique de Komati en Afrique du Sud

La tourbe est le charbon à son jeune stade de formation, c'est le précurseur du charbon, une accumulation de végétation partiellement décomposée qui a subi une légère carbonisation - un processus qui se déroule sous une chaleur et une pression considérables - mais qui peut se transformer en charbon si les bonnes conditions sont réunies.

Ensuite, au dernier rang de la famille du charbon, se trouve le lignite, une roche friable de couleur brune présentant de faibles quantités de carbone (50 à 60 %) et donc peu d'énergie. Le sous-bitumineux suit, c'est le charbon à l'état intermédiaire, présentant un équilibre entre énergie et pureté (60 à 70 %).

Kusile en Afrique du Sud

Ensuite vient le bitumineux, l'épine dorsale de la famille du charbon, formé sous une chaleur et une pression plus élevées. Il contient 70 à 90 % de carbone, ce qui en fait une solution de choix pour des applications industrielles. L'anthracite, le charbon de qualité supérieure, se distingue par sa teneur en carbone la plus élevée (jusqu'à 97 %) et sa densité énergétique, et dont la combustion a un plus faible taux d'émissions.

En d'autres termes, plus la qualité est élevée, plus la combustion est "propre" donc moins il y a d’émissions. Enfin, le graphite, résultat de la dernière étape de carbonisation est un allotrope du carbone, c'est-à-dire une substance composée uniquement d'atomes de carbone, que l’on trouve dans les crayons et qui est couramment utilisé dans les batteries lithium-ion en raison de ses excellentes propriétés de conductivité.

Le charbon et le pétrole, un duo de choc

Aujourd'hui, le charbon est à la fois la deuxième source d'énergie primaire et la principale source de production d'électricité dans le monde - représentant respectivement 27 % et 36 % du bouquet énergétique mondial - et également le combustible fossile le plus polluant. Mais il existe une autre source d’énergie fossile presque aussi utilisée que le charbon : le pétrole.

Le charbon et le pétrole sont comme les deux faces d'une même pièce, chacun possédant des atouts uniques qui se complètent mutuellement. Le charbon est bon marché, il est abondant, tandis que le pétrole est plus polyvalent mais plus difficile à trouver. Le charbon assure la stabilité et fiabilité des réseaux électriques, il peut être utilisé comme matière première dans la production d'acier, de fer et de produits chimiques, et dans les pays ayant peu accès à des combustibles de cuisson propres, il est souvent utilisé en cuisine. Le pétrole, quant à lui, est utilisé pour fabriquer des plastiques, des produits pharmaceutiques, des tissus synthétiques et, plus important encore, il a été jusqu'à présent le carburant idéal pour les transports grâce à sa forme liquide et à sa densité énergétique, qui est en moyenne deux fois supérieure à celle du charbon en termes de poids.

Densité énergétique et émissions de CO2 provenant de la combustion des carburants

La source d'énergie la plus polluante

Tous les organismes vivants sont composés principalement de molécules à base de carbone. Par conséquent, les combustibles fossiles, qui proviennent d’une matière autrefois vivante, contiennent du carbone. Quel que ce soit le combustible, il doit être brûlé pour produire de l'énergie et la teneur en chaleur d'un certain combustible, ou en d’autres termes la quantité d'énergie libérée lors de la combustion, est principalement déterminée par sa teneur en carbone et en hydrogène.

C'est à ce moment-là que le carbone et l'hydrogène qui sont stockés à l'intérieur sont libérés sous forme de dioxyde de carbone et de vapeur d'eau. En outre, plus il y a de carbone chimiquement présent dans le combustible, plus les émissions de carbone seront élevées.

La combustion du charbon produit environ 15 milliards de tonnes de CO2 chaque année. Mais ce n'est pas tout : le CO2 n'est pas le seul sous-produit de sa combustion et c'est la raison pour laquelle le charbon est la source d'énergie la plus polluante. Le dioxyde de soufre (SO2) et les oxydes d'azote (NOx) sont également libérés et contribuent à la pollution de l'air, aux maladies respiratoires et aux pluies acides. À cela s'ajoutent le mercure - un métal toxique qui, lorsqu'il se dissout dans l'eau, s'accumule dans les écosystèmes et constitue une menace pour la vie aquatique et la santé humaine – et les particules qui, selon la composition du charbon, peuvent contenir des éléments toxiques et irritants tels que le cadmium, le dioxyde de silicium, l'arsenic et l'oxyde de calcium.

Si vous vous étiez déjà demandé ce que la combustion du charbon entraîne, vous avez la réponse !

Existe-t-il du "charbon propre" ?

A l'heure où les pays s'engagent à abandonner cette source d'énergie, son utilisation reste prédominante dans certains pays tels que la Chine, l'Inde, l'Indonésie et l'Afrique du Sud en tant que composante majeure du bouquet énergétique. Sur les 30 pays les plus dépendants du charbon, seule la moitié environ s'est engagée à éliminer progressivement cette ressource, et six d'entre eux n'ont même ni fixé d'objectifs pour l'abandon de cette source d'énergie, ni pour atteindre la neutralité carbone.

Notre monde en données basées sur l'étude statistique de BP sur l'énergie dans le monde (2022)

Il a été estimé que pour atteindre les objectifs climatiques de l'Accord de Paris, nous devrions retirer chaque année 117 GW de capacité de production à partir du charbon. Cependant, en 2022, seuls 26 GW ont été retirés et pour ajouter un peu de complexité, alors que le prix du gaz naturel a grimpé en raison de la guerre en Ukraine, de nombreux pays européens ont levé les plafonds sur la production d’électricité à partir du charbon pour éviter les pénuries. Une chose est sûre : nous ne sommes pas sur la bonne voie pour atteindre les objectifs de l'accord de Paris, et le charbon, malgré ses mauvaises performances environnementales, est abondant, efficace et moins cher que la plupart des sources d'énergie.

Tenter d'utiliser cette source d'énergie en limitant ses émissions atmosphériques est un défi majeur, et des efforts sont en cours pour réduire l'impact des centrales électriques au charbon et développer des technologies dites de « charbon propre ». Plusieurs solutions existent, qu'elles agissent en amont ou en aval. Il est possible d'améliorer l'efficacité des centrales électriques au charbon grâce à la combustion supercritique et ultra-supercritique, qui nécessitent moins de charbon par mégawattheure, maximisant ainsi la production d'énergie tout en minimisant les émissions. Une autre possibilité est d'ajouter des précipitateurs électrostatiques ou des systèmes de dépoussiérage pour piéger les particules en suspension et réduire considérablement les émissions de SOx, NOx et de particules fines, et d'utiliser des technologies d'abattement telles que les unités de captation du carbone pour stocker le CO2 de manière permanente.

De nombreuses solutions sont disponibles, toutes sont viables et peuvent contribuer à réduire les émissions dues au charbon. Cependant, aucune d'entre elles ne peut être plus efficace que la réduction de la dépendance au charbon et la diversification du bouquet énergétique par le des énergies renouvelables.